La politique vit seulement s’il y a un sens de l’histoire et à l’aube du nouveau millénaire la conséquence de la chute du Mur de Berlin était très forte, l’appel des nouveaux pays à faire partie de l’Europe, l’idée que ce continent devait fermer une fracture qui s’était ouverte avec la guerre et avec le rideau de fer. Quelqu’un a dit que l’élargissement avait été fait trop vite, qu’il n’a pas tenu compte des peurs. Mais comment fait-on à tenir compte des peurs quand il y a un moment où il faut décider « Oui » ou « Non ». Alors immédiatement, je dois dire avec un effort personnel, j’ai éteint le discours de l’élargissement. L’objectif qui m’avait été donné était, plus ou moins, 6 pays en 10 ans. En moins de 5 ce sont 10 pays, non 6, qui sont rentrés dans l’Union Européenne. Et il était impossible de l’éviter, justement parce que autrement auraient été reproduites les divisions et les tensions, qui auraient freiné le développement et la paix du continent. Voici alors le pouvoir de l’élargissement, fait avec prudence, avec sérieux, avec un travail impressionnant de mes fonctionnaires et de tous les Commissaires ; divisant l’acquis communautaire, c’est-à-dire le patrimoine de nos lois en 31 chapitres différents, analysant chapitre par chapitre avec les pays individuels et les parlements de ces pays qui ont travaillé jour et nuit pour adapter les lois à cette grande nouveauté. Les gouvernements de ces pays qui ont travaillé pour mettre en œuvre ces lois, la Commission qui a surveillé à ce que ce travail soit tel qu’il tranquilliserait l’opinion publique des pays membres et l’opinion publique des nouveaux pays. C’est-à-dire ce sentiment qu’on entrait vraiment dans la même Communauté, un sentiment absolument nouveau avec, je répète, un fait émotionnel, un élément émotionnel fort. Ne sous-évaluons jamais ces aspects de la vie des institutions parce qu’ensuite nous deviendrons également des points de référence de l’histoire. L’élargissement à 10 nouveaux pays représentent 80 millions, presque 80 millions de nouveaux Européens, mais qui viennent d’expériences historiques complètement diverses, ce n’était pas comme les élargissements précédents, l’Espagne, le Portugal, la Grèce, qui avaient dans le fond respiré la même histoire, ici il fallait fermer une blessure. L’élargissement alors n’est pas un message seulement économique, n’est pas un message limité, mais un grand message politique : de l’Europe qui sait exporter la démocratie et l’exporte pour une période longue et pour toujours, parce que ceux-ci deviennent les membres de l’Union Européenne avec une capacité décisionnelle et ces pays pour la première fois, après des siècles pour certains comme la Pologne, se trouvent dans la situation d’entrer dans une Communauté comme amis et comme participants aux décisions et non plus comme des pays écrasés par les puissances autour d’eux. Voici donc pourquoi l’élargissement doit être fait rapidement, doit être fait avec sérieux, mais dans un moment historique qui ne laisse aucune place aux remords, qui empêche les autres éventuellement de ralentir ce grand processus décisionnel. Ainsi le travail est allé de l’avant, et le premier mai 2004, il y a eu cette grande cérémonie, émotionnellement forte, de l’entrée de ces nouveaux pays. Naturellement, ce processus n’est pas terminé, parce que dans le même temps nous avons lancé le problème de « l’Anneau des amis », à construire autour des membres de l’Europe. L’anneau des pays qui partageront tout avec nous, mais sans faire partie de l’Europe, tout sauf les institutions, de façon à donner stabilité non seulement à l’intérieur de l’Europe mais aussi à ceux qui sont autour. Il est clair que l’élargissement n’est pas fini parce qu’il devra englober les Balkans, parce que tôt ou tard, quand ils seront pacifiés, ils entreront en Europe et ensuite reste sans aucun doute le problème de la Turquie. Mais le continent repose sur une nouvelle base, maintenant on a besoin de l’approfondir, de la concrétiser, de
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